Algérie - Les télévisions privées bousculent la presse écrite sur le marché publicitaire

06/08/2014 - 10:10


L’audience sans cesse grandissante des télévisions privées créées après la promulgation en 2012 de la nouvelle loi relative à l’information, les place comme de sérieuses concurrentes de la désormais « ex-Unique » et chamboule le paysage médiatique algérien. Mais, c’est surtout la presse écrite qui commence à en pâtir.
 
Selon des professionnels du secteur de la communication, les chaînes privées de télévision nouvellement créées empiètent sur la part du marché publicitaire de la presse écrite et non pas celle de l’EPTV, qui continue à être considérée comme un partenaire commercial sérieux par les annonceurs et les agences de publicité. Et ce ne sont pas les tarifs appliqués qui motivent le plus les annonceurs. D’autres paramètres, explique-t-on, entrent en jeu. Comme la cible potentielle visée par la publicité. Si le gâteau, pour ce qui concerne la téléphonie mobile ou l’automobile, est partagé par la presse écrite et l'audiovisuelle, les annonceurs qui s’adressent à la ménagère, notamment  pour les produits agroalimentaires ou d’hygiène, se ruent désormais vers les télévisions.
En Algérie, pays de tradition orale, les annonceurs se détournent ainsi vers les supports audiovisuels qui arrivent sur le marché et l’on prédit des années de vaches maigres pour la presse écrite, condamnée selon des acteurs du secteur, à adapter son offre au risque de se retrouver en situation de crise. Car, commente-t-on, à ce rythme, il n’y aura éventuellement que l’Agence nationale d’édition et de publicité (ANEP) pour acheter des espaces dans la presse écrite afin d’y insérer ses annonces légales.
Entre 22 et 30 millions de centimes les 30 sec. en prime time
«C'est que les tarifs du marché et la publicité dans les chaines TV sont aussi chers que dans la presse écrite», s'étonne le patron d’une agence de publicité. Les grilles tarifaires des chaînes que nous avons pu consulter montrent en effet que ce n’est pas une question de prix. A Echourouk TV, chaîne des plus regardées et des plus chères, un spot de 30 secondes en « prime time », soit de 19 h à 22 h, vaut 300 000 DA en hors taxes (2700 euros environ). Il vaut 250 000 DA (2300 euros) à KBC et 220 000 DA (2000 euros) à Ennahar TV. Certaines chaînes comme El Djazairia scinde la plage horaire allant de 19 h à 22 h en deux, soit de 18h45 à 19h45 et de 19h45 à 21h45, pour en gagner plus d’argent et rentabiliser son prime time. Ce faisant, un spot de 30 secondes de 18h45 à 19h45 est commercialisé par El Djazairia à hauteur de 117 000 DA (1020 euros environ) et le même spot de 19h45 à 21h45 à 189 000 DA (1720 euros), soit 306 000 DA (près de 2800 euros) sur toute la plage horaire. C’est juste un peu moins cher qu’une page de publicité dans un journal à grand tirage, mais, ces chaînes qui passent en boucle des spots publicitaires à longueur de journée et sur toutes les plages horaires, parfois jusqu’à 20 minutes non stop entre un programme et un autre, engrangent beaucoup d’argent et se transforment en véritable machines à sous. Bien sûr, fait remarquer un professionnel, « c’est le brut, ensuite il y a les négociations ».
Ces chaînes offrent des remises et commercialisent aussi des packs promotionnels qui permettent aux annonceurs de faire des économies et s’assurer d’une présence régulière durant les heures de grande écoute. A titre d’exemple, un pack de 300 passages par mois chez Ennahar avec 100 passages en prime time se vend à près de 8 millions de DA (7,92 millions) hors taxes (72 000 euros environ) et à 7 millions de DA (64 000 euros).
Un marché favorable aux agences de publicité
Nos sources estiment que ce sont des tarifs plus adaptés au marché que ceux appliqués dans la presse écrite et qui favorisent les agences de publicité, lesquelles touchent des marges plus importantes avec ces nouvelles télévisions privées qu’avec les journaux qui donnent des ristournes allant de 20 à 25 %. « Ces télévisions essayent de comprendre le marché et respectent mieux les agences », a dit un publicitaire. Et d’ajouter : « Contrairement aux journaux qui n’aiment pas lire des études qui ne leur plaisent pas ». Notons que le marché publicitaire algérien pèse environ 120 millions d’euros annuels, que se partageaient presque moitié l’EPTV et la presse écrite avant l’arrivée des chaînes privées. L’ANEP gère près 55% des annonces insérées dans la presse.
Quelques tarifs suivant les plages horaires et la durée du spot
Echourouk TV : Les tarifs oscillent entre 40 000 DA le spot de 5 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 600 000 DA le spot de 55 secondes à l’heure de grande écoute.
Ennahar TV : Entre 19 800 DA les 10 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 440 000 DA les 55 secondes à l’heure de grande écoute.
El Djazairia : Entre 14 250 DA les 5 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 315 000 DA les 55 secondes à l’heure de grande écoute.
Nessma TV verte et rouge : Entre 1500 DA les 5 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 506 000 DA les 55 secondes à l’heure de grande écoute.
Dzair TV : Entre 5625 DA les 5 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 300 000 DA les 55 secondes à l’heure de grande écoute (Comme El Djazairia, elle scinde son prime time en deux).
Samira TV : Cette chaine thématique a une grille tarifaire différente des chaînes généralistes avec moins de plages horaires, et un prime time allant de 14 h a 17 h. Elle applique les tarifs les plus faibles. C’est entre 15 000 DA les 10 secondes lors d’une plage horaire de faible écoute et 70 000 DA les 55 secondes à l’heure de grande écoute.